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Economie des
médias

Les médias subissent un paradoxe qui semble insoluble à court terme. Nous n’avons jamais consommé autant d’informations, au point d’en qualifier notre société post-industrielle de « société de l’information », et pourtant, les médias, ou pour être précis les producteurs d’informations, n’ont jamais eu autant de mal à assurer leur financement. 

 

Alors qu'Internet, d’abord perçu comme une formidable zone d’opportunités, est devenu le lieu de la mise en concurrence frontale de tous les acteurs historiques de média, la valeur publicitaire et la distribution de l’audience leur échappent. La crise de 2007 et des années qui ont suivi a fini de bouleverser le marché publicitaire et, par voie de conséquence, les revenus des médias. Réorganisation, plans sociaux et restructurations, abandon de certaines opérations (parfois rien de moins que la production du support principal que constituait le journal), pression sur les fournisseurs, alliances, rachats, revue du système de subventions, les stratégies de survie ou de développement diffèrent mais mis à part quelques titres, année après année, la question de la rentabilité continue de se poser.

 

Cette pression se répercute sur les agences de presse : les médias ont besoin de plus (et d'autant plus qu'ils ont dû réduire leurs maillages internationaux, qu'ils ont tous besoin de vidéo pour le web...) et de payer moins. Quelles initiatives peuvent prendre les agences pour accompagner leurs clients dans leurs développements ? 

Boul concurrentiel

a. Les agences internationales

 

Elles sont les héritières des bureaux de traductions et de correspondances du XIXè siècle dont l'activité a été rendue possible par l'essor des réseaux télégraphiques.

1835

En 1835, Charles Louis Havas crée l'Agence Havas en développant une activité de traduction de la presse étrangère à destination du gouvernement, du monde des affaires et des médias, avec Paul Julius Reuter et Bernhard Wolff.

1846

En 1846, une première Associated Press naît à New-York sous forme de coopérative autour de 6 quotidiens avant de s'étendre par à-coups à l'ensemble du territoire états-uniens au début du XXè siècle.

1849

En 1849, Bernhard Wolff lance l'Agence Continentale en Allemagne, agence qui deviendra DPA (Deutsche Presse-Agentur) un siècle plus tard.

1851

En 1851, Paul Julius Reuter qui a quitté Havas pour s'installer à Londres lance l'agence Reuters qui deviendra par ailleurs un acteur majeur de l'information financière à partir des années 1960.

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Les grandes agences internationales d'aujourd'hui, principalement AP, Thomson Reuters et l'AFP disposent de réseaux sensiblement équivalents de bureaux à l'étranger (dans presque tous les pays), de journalistes (2 500 - 3 000), photographes (500) et vidéastes. Elles collectent, produisent et diffusent plus d'un millier d'informations politiques, économiques, diplomatiques, sportives, culturelles en au moins 6 langues chaque jour.

Présentation générale de l'AFP ici

a'. Les agences intermédiaires

 

Elles maintiennent ou développent un maillage important de correspondants à l'étranger et un nombre de langues de traductions impressionnant. Si EFE reste très proche historiquement et culturellement des pays d’Amérique latine et du Caraïbe, Anadolou, Xinhua et Sputnik sont l’incarnation des stratégies de soft-power mises en place par les gouvernements de leurs pays d’origine.

1938

Espagne. Créée en 1938, elle étend, avec succès, ses réseaux rédactionnel et commercial en Amérique latine à partir des années 70.

1920

Turquie. Fondée en 1920 par Atatürk.

1931

Chine. Fondée en 1931 par le Parti communiste.

2013

Russie. Fondée par Poutine en 2013 en fusionnant l'agence Ria Novosti et la radio La Voix de la Russie.

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b. Les agences nationales

Press Association au Royaume-Uni, The Australian Associated Press, Belga en Belgique, la Ansa en Italie, la PAP en Pologne, la CTK en République tchèque, Kyodo au Japon (liste des adhérents à Minds http://www.minds-international.com/Site/Members.en.html)… Chaque pays a son agence nationale. Ces agences se reposent sur les agences internationales pour leur couverture de l’étranger. Leurs marchés domestiques sont souvent des marchés « captifs » (monopoles) du fait de la langue et des barrières à l’entrée. Si les agences internationales et nationales peuvent se faire concurrence sur la photo, elles sont souvent partenaires sur le texte et la vidéo.

 

Les agences internationales jouent, chacune sur son territoire domestique à l’exception de Reuters, le rôle d’une agence nationale. 

c. Modèles économiques des agences

Le fonctionnement de toutes les agences de presse généralistes repose sur des modèles économiques « à part » : coopératives, statut sui-generis, financement plus ou moins important par subvention ou abonnement des services de l’état… C’est l’éloignement des structures capitalistiques qui garantie l’indépendance de ces organismes et la neutralité de l’information.

 

Les agences de presse sont des « grossistes de l’information ». Leur raison d’être est mutualiser les coûts de production de l’information pour les médias. Plus le réseau est dense, plus il est cher à maintenir (mais plus il peut rapporter). Le principal poste de coûts des agences est la masse salariale qui représente 60 à 80% des charges. Il faut disposer d’un bureau dans chaque pays ou presque, l’équiper, le doter d’une équipe de 2 personnes au minimum, jusqu’à 100 - 150 personnes pour une antenne régionale. Rapporté à ces coûts fixes très élevés, le coût marginal de production d’une dépêche est négligeable. Le marché traditionnel des agences de presse est un marché de monopole.

 

De par son maillage domestique et international, on attend d’une agence qu’elle remplisse les fonctions d’alerte, de développement de factuels, de repères (mémoire, analyse) et surtout de vérification. Avec les développements techniques, les agences se sont dotées de services photo, vidéo, infographie. 

 

Une fois le marché traditionnel des agences, le marché des médias, saturé, une fois l’offre de produits « traditionnels » épuisée (texte, photo, vidéo, infographie, online), comment continuer à se développer ?

 

Alors que les médias vivent depuis la moitié des années 2000 une crise structurelle, comment les agences peuvent les accompagner ?

 

Le modèle des agences offrent, dans le panorama actuel, chahuté, à la fois des opportunités et des risques : 

  • Les médias qui disposaient de réseaux de correspondants en propre à l’étranger ont tous dû réduire la voilure ces dernières années.

  • Les médias qui étaient dans une temporalité plus longue sont devenus des médias temps réel, voire mobile first.

  • Les sources possibles d’alertes pour les médias se sont multipliées de manière exponentielle avec les smartphones et les réseaux sociaux.

  • La baisse de la valeur des entreprises de médias a favorisé les regroupements et, de facto, la pression sur les fournisseurs.

 

Les stratégies des grandes agences internationales reposent sur trois axes dans des proportions différentes :

  • Accroître leur notoriété pour mieux pénétrer de nouveaux marchés (international, nouveaux types de clients)

  • Raccourcir les cycles d’innovation pour mieux répondre aux besoins de tous les types de clientèles

  • Diversifier l’origine de leurs recettes dans un secteur où l’ensemble des clients cherche à modérer ses dépenses

En 2015, l’AFP génère 280 millions d’euros de chiffres d’affaires dont 172 millions issues des recettes commerciales. Le chiffre d’affaires d’AP a fondu un peu plus chaque année jusqu’à atteindre 568 millions de dollars en 2015 (503 millions d’euros) contre près de 750 millions de dollars avant la crise. Les 319 millions de dollars (282 millions d’euros) de chiffre d’affaires de l’activité médias de Reuters représentent 2% des 12,5 millards de chiffre d’affaires du groupe. 

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